Sankhara

Quelle joie quand je suis tombée sur Sankhara, titre d’une auteure dont j’ai eu un coup de cœur pour le roman La grand-mère de Jade il y a de cela plusieurs années. Je me suis réjouie de retrouver l’écriture de Frédérique DEGHELT, d’autant que le résumé était tentant. Malheureusement, ma motivation s’est estompée au fil des nombreuses pages de ce livre bien trop dense mentalement, lequel m’a demandé de nombreuses pauses récréatives à l’aide de bandes dessinées, d’albums et de romans jeunesse plus légers. Comme quoi, je le répète, un roman d’un auteur n’est pas l’autre.
Ceci étant dit, malgré la difficulté de lecture rencontrée, la plume de l’auteur reste à mettre en avant car de belle qualité. Pas sûre cependant de la relire avant un moment.

Résumé : Suite à une dispute violente avec son conjoint, Hélène part en retraite à la campagne pour participer à un stage de méditation. Elle part pour une durée de 10 jours, ne laissant derrière elle qu’une lettre au contenu assez vague. Sébastien, son mari, vit mal ce départ précipité et mystérieux. La colère le gagne petit à petit. S’ajoute à cela une période difficile professionnellement. Journaliste, il est au cœur des attentats qui viennent de toucher les États-Unis.
Hélène et Sébastien vont, chacun à leur manière, devoir puiser au fond d’eux-mêmes pour relever la tête et comprendre le monde sans détour.

Avis : Deux protagonistes mènent la danse dans ce roman et offrent chacun leur point de vue sur une même situation. Les réflexions de Sébastien se révèlent souvent plus terre à terre que celles de sa femme, ce qui en facilite la lecture puisque cela rend les choses plus concrètes pour le lecteur. Les pensée d’Hélène, elles, sont plus intuitives et, de ce fait, brouillonnes. Le fil de ses idées est parfois difficile à suivre et le liseur peut décrocher à de nombreuses reprises. D’autant que l’auteure perturbe la coordination du suivi des journées de ce personnage en faisant des sauts de temps perturbants. Il faut être concentré lors de la lecture de ce roman pour ne rien perdre du récit et des réflexions intéressantes qu’il soulève. En effet, Frédérique Deghelt décortique des sujets épineux tels que la moralité dans le monde de l’information ainsi que les attentats. Ceux-ci s’ajoutent au propre du récit, à savoir la méditation en vue de la recherche de soi ; thème déjà conséquent en lui-même. Bref, l’addition de tant de questionnements, bien qu’intéressante, est lourde et dense. Surtout que l’auteure aime aller au fond des choses. Le lecteur est submergé d’informations et d’un sentiment de rébellion. Il se noie et perd pieds. Des pauses s’imposent lors de la découverte de ce titre.
Heureusement, ce « trop » est porté par une écriture de qualité, agréable dont ressortent de belles citations en plus de provoquer de profondes pensées chez le liseur. Cette plume délicate rééquilibre le plaisir ressenti par cette lecture. À cela s’ajoute une remise en question intéressante de la part des deux protagonistes qui comprennent, petit à petit, que nul n’est seul responsable d’une situation. La réflexion autour de ce point est appréciable.
Un roman qui demande concentration et persévérance !

Citations : – « L’information ce n’était pas la découverte de l’humanité, ce n’était pas de raconter la souffrance, la beauté des humains à travers ce monde, mais l’uniformisation des vies, la négation des âmes, la banalisation quotidienne des tragédies humaines. Le tout résumé par une image bien symbolique ! »

– « […] la timidité est aussi une forme d’ego. Courir le risque de paraître stupide aux yeux des autres sans s’en affecter est la preuve d’un certain détachement de soi. »

– « Bien sûr que les humains sont ainsi ! Aspirant à la récompense d’un comportement méritant. Réflexe judéo-chrétien d’attente du paradis. »

– « Je sais maintenant, que la haine ordinaire commence par la haine de soi. Que le droit de juger que j’ m’arroge, comme la plupart des gens, génère une calomnie banalisée dans laquelle la méchanceté trouve son compte. Être nuisible évite de s’interroger sur ses propres failles, sur ses manques, ses chagrins, sa douleur profonde. On finit par croire à ce que l’on dit de dégradant pour l’autre. Mais tout a un prix. Attaquer l’autre, c’est se démolir soi sans s’en rendre compte. »

– « _ Pourquoi crois-tu au miracle ? me murmurait-il chaque soir.
_ Parce que j’ai toujours vécu dans un monde où l’homme a marché sur la Lune ! Je ne sais pas ce qu’est l’inaccessible. Je crois que le désir d’abord, puis le rêve et enfin le travail, sont à la base de tout projet, si fou soit-il ! Et surtout, il faut s’aimer. Fort, inconditionnellement. »

Référence : Sankhara / Frédérique Deghelt (Actes sud ; Babel : 1792)

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